
La médiation a ceci de particulier qu’elle permet d’explorer des conflits sous un autre angle, en recherchant non pas un vainqueur et un vaincu, mais un terrain d’entente qui respecte les intérêts de chacun. L’affaire que je vous raconte aujourd’hui illustre bien cette dynamique.
Lorsque j’ai reçu l’appel d’Antoine, propriétaire d’une charmante maison en périphérie de Lausanne, j’ai tout de suite perçu la tension dans sa voix. « Je ne peux plus continuer comme ça, avec notamment l’augmentation des intérêts de mon hypothèque, je dois adapter le loyer, mais mes locataires refusent toute discussion ».
De l’autre côté, Léa et Marc, installés dans cette maison depuis plusieurs années, étaient exaspérés. « Non seulement le loyer est déjà élevé pour le quartier, mais la cave est un véritable cauchemar, elle est si humide que nous avons perdu des cartons de vêtements et nous ne pouvons rien y stocker ».
Les lettres recommandées avaient commencé à pleuvoir et la communication entre les parties était rompue. Je leur ai alors proposé une médiation.
Lors de la première séance, l’atmosphère était lourde et électrique, Antoine campait sur ses positions, expliquant qu’il n’avait pas d’autre choix que d’augmenter le loyer pour compenser la hausse de ses charges bancaires. Face à lui, Léa et Marc défendaient leur point de vue avec énergie, pourquoi payer plus pour un logement qui n’offre pas les prestations attendues.
Au fil des discussions, j’ai pu créer un espace d’écoute et de compréhension. Antoine, qui voyait sa maison comme un investissement vital, a peu à peu saisi que pour Léa et Marc, il s’agissait avant tout d’un foyer et un lieu de vie. Quant à Léa et Marc, ils ont fini par réaliser qu’Antoine ne cherchait pas à s’enrichir sur leur dos, mais qu’il faisait face à une situation économique délicate.
Lors des séances suivantes, nous avons approfondi chaque argument, Antoine évoquant la hausse des différents coûts de son immeuble, tandis que Léa et Marc insistaient sur les réparations qui tardaient à être effectuées. J’ai proposé un moment de pause, où chacun a pris le temps de réfléchir aux concessions possibles. Cet instant a été décisif, puisqu’Antoine a reconnu qu’il n’avait pas mesuré l’impact de la cave humide sur la vie quotidienne de ses locataires et Léa et Marc ont admis qu’ils ne voulaient pas quitter cette habitation.
Finalement, après plusieurs rencontres, ils ont trouvé une solution, soit que le loyer resterait inchangé, offrant ainsi à Léa et Marc la stabilité recherchée, tandis qu’Antoine obtenait l’engagement des locataires qu’ils réaliseraient certaines réparations à leurs frais, notamment pour mieux isoler la cave. Ce compromis préservait l’équilibre entre les intérêts des deux parties.
Quelques mois plus tard, Antoine m’a recontacté et m’a dit que la relation avec ses locataires s’était améliorée et qu’ils discutaient plus facilement. Léa et Marc, de leur côté, ont confirmé qu’ils avaient retrouvé une certaine sérénité et que les travaux entrepris avaient suffi à améliorer leur confort.
Ce dossier est un parfait exemple de ce que la médiation peut accomplir. Plutôt que de s’enliser dans une bataille juridique, Antoine, Léa et Marc ont choisi de dialoguer, de s’écouter et de trouver une issue bénéfique à tous. Et c’est bien au fond de cette cave humide que la lumière s’est faite non pas en s’affrontant, mais en se comprenant.
Lausanne, le 10 février 2025